Après les pluies aux dramatiques conséquences qui ont touché une grande partie de notre pays à la fin du mois de mai, tous les services publics concernés sont rapidement passés à l’analyse des événements afin d’en tirer les leçons. L’est du Val d’Oise n’a pas été épargné par les intempéries comme en témoigne les données pluviométriques. Pourtant, cette partie du département a plutôt été préservée. Le SIAH, service public d’aménagement hydraulique qui gère le risque « inondation » sur le bassin versant du Croult, aménage depuis plus de 20 ans un dispositif de retenue des eaux pluviales couplé à un système de contrôle à distance. Ce long travail, parfois contesté, a permis d’éviter les catastrophes que cette région a vécues dans le passé.
Nombreux sont les Sarcellois qui se souviennent de l’année 1992, et pour cause : 1m60 d’eau en plein cœur de ville pendant 15 jours. Stupeur ressentie par les habitants qui pour la plupart ignorait l’existence même du cours d’eau, le Petit Rosne. Le traumatisme est toujours dans les mémoires et nombreux sont ceux qui, les 30 et 31 mai derniers, sont venus vérifier le niveau de la rivière. À Sarcelles comme ailleurs, le SIAH a construit des bassins de rétention des eaux pluviales, plus d’une trentaine en tout. Et ces bassins se sont remplis pour beaucoup à 100% permettant d’arrêter un volume de 850 millions de litres d’eau dans la seule nuit du 30 au 31 mai.
Il faut dire qu’en termes de pluies, le mois de mai a été exceptionnel. Du jamais vu depuis 30 ans, selon les spécialistes. Il a plu 24h00 sans interruptions. La station Météo France de Roissy (à l’est du bassin versant), a mesuré, sur la seule période du 30 et 31 mai, 43mm de précipitations. Pire encore, la station de Villaines-sous-Bois (située à l’ouest du bassin versant) a, quant à elle, enregistré 65,8 mm de précipitations tombés en 20 heures seulement ou encore à Jagny où 62 mn sont tombés en 27h00. La station de Saint-Witz (au nord-est du bassin-versant) a comptabilisé 41 mm de pluies sur 28h00. C’est donc le secteur Nord-Ouest qui a reçu le plus grande part des volumes ce que confirment d’ailleurs les niveaux de remplissage des bassins de rétention disséminés sur le territoire. Facteur aggravant, cette pluie a été précédée de périodes pluvieuses qui ont eu tendance à gorger les sols d’eau. Saturés, ceux-ci n’ont pu que laisser glisser l’eau excédentaire faisant ainsi monter rapidement le niveau des cours d’eau. C’est à ce moment qu’interviennent les bassins de retenue.
Ces ouvrages, souvent invisibles tant ils se fondent la plupart du temps dans le paysage, permettent au SIAH de « forcer » la rivière à déborder dans le bassin plutôt qu’ailleurs. La rivière en furie y pénètre, ses flots en partie bloqués par une vanne vont remplir le bassin, tandis qu’à l’aval de l’ouvrage, le cours d’eau en ressort avec un débit maîtrisé, sans risques de débordements. Le service d’astreinte du SIAH, sur le terrain toute la nuit, a parcouru les bassins situés au nord-ouest pour régler les vannes et en adapter l’ouverture en fonction des flux hydrauliques et de précisions météorologiques fines sur son territoire d’action. Ce combat contre les éléments, mené à la force des bras pour bouger des vannes de plusieurs centaines kilos au centimètre près, s’effectue sur les bassins qui ne sont pas encore équipés du système de télégestion. Ce dernier permet en effet de manœuvrer plus rapidement grâce à une motorisation de la vanne, gain de temps crucial en situation de crise. La télégestion comprend également un ensemble d’instruments de mesure permettant au SIAH d’avoir, à distance depuis un simple ordinateur, une vision en temps réel de la situation.
Le SIAH a pour objectif d’installer à terme ce système de télégestion sur l’ensemble de son parc de bassins de retenue. Cet été, le bassin de retenue du Bois d’Orville, situé entre Louvres et Goussainville, se verra doté du dispositif. C’est au prix de travaux longs, d’investissements humains, techniques et financiers engagés depuis plusieurs décennies que ce réseau de bassins de rétention peut répondre à des pluies dites cinquantennales (qui ont une probabilité sur cinquante de se produire dans l’année). Le volume d‘eau tombé autour de Villaines-sous-Bois et de Jagny, la nuit du 30 mai, correspond d’ailleurs à une pluie vraisemblablement supérieure à ce seuil.
Mais gardons-nous de tout angélisme ! Nous savons bien que face à la nature, le risque zéro est illusoire et ce quels que soient les dispositifs que nos sociétés sont capables de mettre en place. Tout au plus, pourrons-nous parler de réduction du risque et de capacité d’intervention. Quoi qu’il en soit, le SIAH poursuivra, ces prochaines années, les investissements en matière de lutte contre les inondations face à un risque qui ne cesse d’augmenter.